
28 juin 2024
Ce jeudi 27 juin s'est tenu le Conseil Municipal de Sélestat. A l'ordre du jour, le remboursement anticipé d'un prêt dit toxique contracté auprès de la banque Dexia. Il était également question de géothermie, d'un plan de prévention bruit en ville et de la gestion de quelques incivilités constatées. L'ambiance climatisée de la salle Saint-Barbe n'a pas empêché les esprits de s'échauffer.
Le Conseil a débuté sur la modification du règlement intérieur du Conseil Municipal de la Ville de Sélestat. Un point qui paraît anodin mais qui ne l’est pas pour tout le monde, notamment pour Caroline Reys, du groupe minoritaire "Sélestat Terre Humaniste". Du fait de la réorganisation récente du Pôle Immobilier et Moyens Techniques et du Pôle Ressources et Modernisation, il était nécessaire de mettre à jour ce règlement. Quatre modifications ont donc été apportées : la suppression de l’écriture inclusive dans le document par soucis d’homogénéité avec les autres documents administratifs de la collectivité, la modification de l’article 37 pour le délai d’organisation du débat d’orientations budgétaires avant l’examen du budget, la modification des modalités de signature du procès-verbal de séance de l’article 57 et enfin, la modification de l’article 60 pour tenir compte des nouvelles dispositions législatives.
« On ne peut que regretter que ces modifications n’aient pas fait l’objet d’un travail collectif », déplore Caroline Reys. Selon elle, la modification d’un règlement intérieur est l’occasion de « permettre au pluralisme de s’exprimer » et de « faire vivre la démocratie ». La conseillère municipale pointe le fait que la modification portée à l’article 60 semble rendre le procès-verbal inaccessible au public. « En matière de transparence, c’est très discutable », ajoute cette dernière. Elle termine par un rappel au règlement de l’article 34, qui stipule que l’alsacien est admis comme langue d’expression mais que toute intervention doit être traduite en séance et pas seulement dans le procès-verbal. « Ce n’est jamais respecté et cela revêt de fait un caractère discriminatoire puisque tous les non-dialectophones sont exclus du débat », conclut-elle. Son groupe d’opposition s’est donc abstenu au moment du vote.
Le maire assure que les procès-verbaux et les délibérations resteront consultables par tous, sur le site de la Ville. Concernant le dialecte, ce dernier évoque des efforts qui seront faits à l’avenir. S
Les emprunts Dexia à nouveau évoqués
Lors de ce conseil du 27 juin, le sujet des emprunts à risques contractés avec la banque Dexia, dont les taux se sont envolés au moment de la crise financière, été remis sur la table. « Je rappelle qu’il s’agit d’un emprunt contracté en 2011, dont le capital restant dû au 1er janvier 2024 s’établit à 1 640 000€ », commence Philippe Desaintquentin, adjoint aux finances. La date d’extinction de cet emprunt est fixée au 1er décembre 2033. En 2022, le taux d’intérêt s’élevait à 10%, à 12,9% en 2023 et à 12,2% à ce jour. Les anticipations de marché ne permettant pas d’anticiper l’amélioration de la situation ces prochaines années, la Ville a été destinataire d’une proposition de la banque Dexia, visant à réduire le montant des pénalités de remboursement anticipé. La Ville devrait évidemment se financer auprès d’un autre établissement bancaire, pour un montant de 1 790 000 €. Une somme qui correspond à la fois au capital restant et à la pénalité de remboursement. Une consultation a ainsi été lancée auprès de différents partenaires bancaires, cette dernière est toujours en cours mais le coût d’un nouvel emprunt s’élèverait à 2 280 000€, permettant tout de même d’escompter un gain d’environ 180 000€. « Au-delà du gain financier, le rachat de l’emprunt Dexia permettrait de donner un signal politique fort pour nos concitoyens. L’opération permettrait d’assainir les structures de notre dette, en se débarrassant d’un emprunt classé 3E, le pire qui puisse exister », explique l’adjoint.
Caroline Reys pointe le choix hasardeux de la Ville, fait il y a une quinzaine d’années. « On atteint des sommes considérables qui auraient pu être investies bien plus utilement dans la Ville. (...) Le maire s’est montré joueur et c’est la Ville qui a perdu », affirme la conseillère. Elle ajoute que son groupe s’abstient à ce vote, en raison du manque de concertation concernant ces décisions.
Jean-Pierre Haas, du groupe minoritaire "Bien vivre ensemble et bien faire ensemble à Sélestat" (BVEBFE), prend ensuite la parole en se demandant si ce choix de remboursement par anticipation est judicieux en cette période de détente des taux. Le conseiller municipal profite de son intervention pour rappeler que lors du précédent conseil municipal, il avait interpellé le maire et l’adjoint aux finances concernant la trésorerie de la Ville. « La trésorerie représentait hier à peine un peu plus de 2,5 millions d’euros (…) et vous allez encore sortir 2 millions d’euros pour le remboursement Dexia. La trésorerie continuera à être serrée », explique ce dernier.
« Quoi dire, je suis choqué Monsieur Haas par votre discours », répond l’adjoint aux finances. « Je suis adjoint aux finances depuis deux ans et je souffre de cet emprunt structuré. Aujourd’hui ça nous coûte 200 000€ d’intérêts et ça va continuer. Ce prêt on va le solder, bien sûr que ça ne nous plaît pas, mais à un moment il faut en terminer et passer à autre chose », ajoute-t-il. Le maire finit par ajouter qu’il est temps d’arrêter de parler de ce prêt. Concernant la trésorerie, il explique que celle d’il y a quelques années était très bonne en provision des investissements conséquents, d’où les dépenses actuelles.
Installation d’un doublet géothermique sur nappe aux Tanzmatten
Dans le cadre du Marché Global de Performances Énergétiques engagé en 2022-2023, l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie) a décidé de soutenir financièrement l’installation d’un doublet de forages géothermiques, afin de produire du chaud et du froid. L’aide s’élèverait à un montant maximum de 372 000€. Jacques Meyer, premier adjoint au maire chargé du patrimoine et des grands travaux, précise que pour bénéficier de ce soutien financer, la Ville s’engage à réaliser les objectifs de performance énergétique et de diminution de consommation, soit une économie de 101 Tonnes équivalent CO2 par an. L’adjoint a tenu à rappeler qu’après une année de fonctionnement de la pompe à chaleur, les consommations de gaz ont été réduites de 98%, soit une économie de 100 000€, ainsi que les consommations électriques d’environ 6%.
Caroline Reys interpelle l’adjoint, notamment au sujet de l’isolation thermique de l’équipement. « Si on souhaitait isoler ce bâtiment, les coûts seraient tellement importants qu’au niveau de l’énergie utilisée on ne s’en sortirait pas », répond ce dernier. Le maire ajoute qu’isoler un tel bâtiment reviendrait à le « défigurer », notamment en raison du nombre important de vitres.
Moins de nuisances sonores en ville
Dans le cadre de l’application d’une directive européenne, les grandes agglomérations doivent faire l’objet de Plans de Prévention du Bruit dans l’Environnement (PPBE). L’objectif est de protéger la population, les établissements scolaires mais également les établissements de santé des nuisances sonores excessives. Des mesures ont déjà été mises en place ces dix dernières années, notamment la pose d’un radar indicateur de vitesse en 2007 et la limitation de vitesse fixée à 40km/h en 2023.
Caroline Reys pointe du doigt le fait de ne pas avoir entendu parler de cette étude publique et rappelle que Sélestat fait partie des villes qui subissent le plus de trafic avec plus de trois millions de véhicules par an. « Le bilan est consternant, en 20 ans vous n’avez pris que trois mesures dont la pose d’un radar indicateur de vitesse, c’est ridicule », ajoute cette dernière. Elle propose certaines suggestions, notamment l’élaboration d’une étude qualitative et quantitative du trafic de poids lourds sur l’axe nord-sud, la fermeture à la circulation des moteurs thermiques en centre-ville quand les commerces sont fermés ou encore agir sur les nuisances sonores causées par les deux roues dont les pots d’échappement sont trafiqués. « Je ne peux pas soutenir un plan aussi médiocre et mal préparé. La ville et le bien-être de ses habitants méritent mieux », conclut-elle.
Les jets de mégots, un véritable fléau
Rarement montré du doigt, le jet de mégot au sol ou dans les égouts constitue un acte lourd de conséquence puisqu’il peut contenir jusqu’à 3000 substances toxiques et pollue, à lui seul, 500 litres d’eau. 2 à 15 ans sont nécessaires pour dégrader complètement un mégot jeté. En France, 2/3 des mégots finissent au sol et la situation est tout autant déplorable à Sélestat. Lors du conseil, il a alors été proposé de mettre en place un programme d’actions en partenariat avec ALCOME, afin de réduire ce déchet.
La mission principale d’ALCOME est de réduire de 40% la présence de mégots sur l’espace public d’ici 2027, en accompagnant les collectivités avec notamment un soutien financer allant de 1,08 à 1,58€ par habitant et par an pour les villes de moins de 50 000 habitants ainsi que la distribution de cendriers de poche gratuits. Le groupe d’opposition de Caroline Reys félicite ce partenariat. Denis Digel ajoute que cette action « va dans le bon sens » mais rappelle le souhait d’être plus souvent concerté et sollicité pour des réunions de travail. « On a à cœur de participer, on a envie d’aider sur ce sujet-là », ajoute ce dernier.
En fin de conseil, Caroline Reys a tenu à attirer l’attention du public sur les prochaines élections législatives, notamment concernant la potentielle montée de l’extrême droite au pouvoir. « J’espère que nous sommes nombreuses et nombreux à prendre la mesure de la menace que cela représente », exprime la conseillère. Elle en appelle au sens des responsabilités de chacun en ne tombant pas dans la facilité qui consiste à discréditer tel ou tel candidat ni dans le populisme qui consiste à diffuser des informations mensongères. Elle rappelle également que parmi les candidats, deux d’entre eux ont siégé au Conseil Municipal. « Marc Ruhlmann et Charles Sitzenstuhl, aucun des deux ne s’est montré irrespectueux ni insultant ni discriminant et encore moins extrémiste », dit-elle, en évoquant leur loyauté dont il « faudra se souvenir au second tour ».
Propos recueillis par Anaïs Follenius (AZUR FM) / © Crédit photo : Anaïs Follenius